Lausanne jardins 2004
2004
120 m2
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Dans son travelling paresseux, le regard du voyageur en train, bénéficie d’un point de vue unique sur les coulisses de la ville. Les yeux se promènent dans les arrières-cours, caressent les façades des entrepôts à l’affût de détails inhabituels ou de scènes incongrues que les trottoirs civilisés ont fini par lisser.
Pendant ces trajets où le regard s’abandonne lassivement, la ville toute entière devient un jardin que l’on traverse le temps de son voyage. Un enchaînement de scènes, de points de vue, déconnectés, qui raconte par les collages irrationnels et imprévus du regard une histoire toujours différente ; un agrégat de flashs, d’images fugaces et d’impressions rétiniennes composent l’histoire intime du trajet.
Installé dans l’espace apparemment sans promesse d’une friche ferroviaire, les contours surprenants d’un ‘jardin en mouvement’ surgissent. Un point sur le parcours du voyageur où son œil rencontre l’improbable, le surprenant et le sort ponctuellement de sa torpeur où l’avait plongé le déroulement continu de la scène urbaine et le rythme hypnotique des boggies.
Les voyageurs les plus curieux qui souhaiteront comprendre quelle farce leur a été jouée seront certainement tentés de revenir sur les lieux de leur surprise, visiter l’illusion afin d’en démasquer l’effet. Sans doute parcourront-ils l’installation / jardin avec la gourmandise et la satisfaction de celui qui comprend le ‘truc’ en se répétant ‘c’était donc ça’!
Le visiteur qui découvrirait à pied l’installation pour la première fois sera sûrement surpris par les formes improbables et apparemment gratuites du jardin. Peut-être sera-t-il séduit par les écrans de houblon doré qui se dresseront au dessus des parterres lumineux de sédums et d’euphorbes. Ce qui est certain c’est l’interrogation que va soulever la présence de ces formes incongrues au milieu de la friche Malley. Il se promènera dans une forme dont le sens des contours lui échappe. Comme si elle s’adressait à quelqu’un d’autre. Un peu comme ces dessins d’animaux géants dans le désert péruvien de Nazca que l’on ne comprend que du ciel.
Lorsque le visiteur comprendra qu’il se trouve au cœur d’un dispositif visuel à l’adresse des voyageurs du train qui passe quotidiennement en marge de la friche, il se peut alors qu’il soit tenté de prendre le train à son tour pour trouver le point de vue idéal (point sublime) qui permette enfin de rencontrer la forme.